Chapitre XXXIV

Mon pavillon flotte au vent de mer et trace des sillons dans la brume de l’aube.
Au loin tandis que la houle cogne la coque
et confère à l’atmosphère lourde une étrange densité,
je te devine dans le halo, droite, tendue, au bout de la jetée.
Des nappes d’air humide déforment ton visage.
J’en devine, pourtant les beaux angles doux.
Je saisis, dans l’onde électrique, l’éclat lumineux de ton regard.
Tout est d’or et la soie de ta peau que je voudrais parcourir
du bout des doigts m’est interdite par l’océan et les courants.
Je tente de saisir ton image qui s’évapore,
et de rage je pleure le caractère vain de mes actes.
Tu es là, à cheminer vaillament sur l’eau de mes matins.
Nos destins s’entrecroisent en un lacis inextricable
sans que rien n‘arrive, comme un champ de forces où l’attraction
et la polarité sont seuls et mêmes, bien assurés et destinés à nous meurtrir l’âme.
Il n’est plus rien en moi, que cette étrange tension, cette drôle de passion pour le néant.
Je te regarde, encore, encore et encore…
sous tes visages tels qu’ils me viennent des rides de l’eau.
Le mouvement du monde nous emporte si loin de nous mêmes
J’aurais tant aimé…

 

Pour lire la postface